Tanzanie - Serengeti - Jour 2
Nous nous levons aux aurores pour surprendre la savane encore endormie et assister au lever du soleil. Le café avalé à la hâte nous réchauffe à peine : l’air est étonnamment frais. Tandis que nous quittons le camp, la piste cabossée nous secoue sans ménagement – ici, on appelle ça le « massage africain ». Dans ce véhicule bringuebalant, je règle fébrilement mon appareil photo quand soudain, à quelques dizaines de mètres, un couple d’éléphants surgit dans la lumière naissante.
Nos premiers éléphants du séjour ! Leur silhouette imposante se détache sur le ciel embrasé. La lumière rasante sculpte leurs formes, offrant une scène presque irréelle. À travers le téléobjectif, j’ai l’impression qu’ils me regardent du coin de l’œil. Même à contre-jour, je distingue la pupille et leur large bouche. On a l’impression qu’un énigmatique sourire se dessine sur leur visage.
C’est dans ces moments que la technique photographique prend tout son sens. La lumière changeante de l’« heure bleue » puis de l’« heure dorée » exige une attention constante :
Jouer sur l’ouverture, grande lorsque la lumière est faible, plus fermée quand elle se fait frontale ;
Surveiller la mesure de luminosité, souvent trompée par les forts contrastes.
Le défi est de taille : ajuster ces réglages tout en suivant des sujets en mouvement constant. Je vous conseille au final de désactiver l’ISO automatique pour reprendre la main sur l’exposition ;
Après quelques kilomètres seulement, d’autres habitants apparaissent dans la lumière douce du matin : des gazelles de Grant et des topis, ces antilopes au faciès étrange, presque fantastique.
À 7h, le soleil est déjà plus haut, et le ciel se remplit de dizaines de montgolfières multicolores s’élevant au-dessus de la plaine. Le spectacle est grandiose, et nous savourons d’autant plus l’idée de notre propre vol prévu le lendemain.
Un peu plus loin, ce sont des lions que nous apercevons. Trop éloignés pour capturer des images exploitables, même avec le télé-convertisseur. Mais la journée ne fait que commencer, et notre guide nous propose de nous amener au sud du Serengeti où il est fréquent de rencontrer des grands félins. Soudain, une mère éléphant et son petit s’approchent, si proches que j’en oublie presque de déclencher.
La matinée est marquée aussi par une succession de rencontres de grands rapace: aigles, vautours, mais surtout de nouveaux groupes d’éléphants. Il est impossible de rester indifférent face à ces mastodontes de la nature qui se meuvent avec une inconcevable grâce au milieu des hautes herbes.
Pour souligner la texture incroyable de leur peau, j’expérimente en post-traitement : accentuation du contraste local, et parfois conversion en noir et blanc. Ces choix techniques renforcent la puissance et la majesté qui se dégagent de leur présence.
En route vers le sud du Serengeti, la savane se transforme. La végétation se clairseme, laissant place à des herbes jaunes ondulant sous la brise. Perché sur le toit du véhicule, tanguant au rythme des pistes, j’ai l’impression de voguer sur un océan infini. La faune se fait plus rare également. C’est alors qu’au milieu de la piste de nous rencontrons un couple de chacals. Les voila qui font plusieurs fois le tour de notre véhicule à l’arrêt. Si proche ils sont difficiles à saisir, d’où l’avantage d’avoir équipé un deuxième boitier d’un 70-200mm
La radio crépite : des lions ont été repérés. Sur place, trois mâles et une femelle nous offrent une scène digne d’une tragédie shakespearienne. Les deux perdants de la joute amoureuse observent de loin, dépités, tandis que le troisième, un brin gauche, tente vainement de séduire la femelle, aussitôt repoussé de façon virulente dès qu’il se montre trop entreprenant. Une petite leçon sur le consentement.
Nous pique-niquons un peu plus tard à l’ombre d’un rocher, entourés d’oiseaux colorés, dont un splendide toucan Samburu et un héron gris.
Puis, nous reprenons la piste, explorant les kopjes, ces formations rocheuses qui abritent de petits animaux que l’on appelle les damans des rochers mais aussi souvent des grands félins. Effectivement, deux lionnes et leurs petits somnolent sous un arbre. C’est une scène d’une tendresse infinie. Grâce à la complicité de notre guide Micky, toujours attentif à mes demandes, nous ajustons nos positions pour varier les angles et capter au mieux ce moment.
La journée s’achève par une ultime série de rencontres : un vieil éléphant solitaire, des babouins perchés dans les arbres, un crocodile guettant au bord de l’eau. Nous rejoignons le camp au nord de Seronera en fin d’après-midi. La piscine et le coucher de soleil sur la savane nous attendent, comme une récompense après une journée d’aventure et de photographie.